dimanche 14 décembre 2014

Pause poésie

Je n'ai pas du tout, mais alors pas du tout le temps de bloguer.

C'est ballot parce que j'avais l'intention d'écrire une longue tirade existentielle sur la digestion du confit de canard chez les loutres gersoises en préménopause, j'avais toute la doc sous la main après des mois de recherches, mon plan était fait, la conclusion toute construite dans ma tête mais j'ai pas le temps de l'écrire, j'ai trop de clients sur le feu.

À la place je vous livre une des premières fables qui berça mon enfance. C'est mon père qui me l'avait apprise je pense. C'est à lire à haute voix. Sinon ça marche pas. (Éloignez les enfants, les coincés du cul et du second degré).

Attention ça va aller très vite.


Un hanneton volage près d'une pie passa.
Mais la pie était sage, et ne le happa pas.

Moralité:
Ah! Quel bel appât que la pie n'happa pas!

(Oui c'est écrit plus gros que d'habitude, c'est pour que ça prenne plus de place, ya pas de raison, au lycée ça marchait sur les copies de français et de philo).



mercredi 3 décembre 2014

ZZZZ.


On passe quoi, un tiers de notre vie à dormir? (la flemme de faire des recherches pour vérifier. A vue de nez un peu plus qu'à faire caca, un peu moins qu'à faire à bouffer? J'ai bon? L'inverse alors? Non? Bon).

En ce moment je dors comme un plomb et je rêve comme un plomb aussi (c'est-à-dire c'est lourd). Je fais des rêves baroques, souvent à la Hitchcock, avec un premier rôle (ah ben oui, moi, vous croyez quoi?) des seconds rôles (ça change), et cette fille.

Parfois elle fait juste de la figuration, par exemple je rêve que je galope dans la pampa à cheval sur une girafe radioactive, poursuivie par un troupeau de ténors alopéciques, et hop, au détour d'un sarcophage égyptien je la vois en train d'attaquer un sandwich au cassoulet par la face nord.

Ou bien je prends tranquillement mon accélérateur de particules pour partir soigner sur le front les blessés de la guerre de Cent ans en leur faisant manger des pages de livres, et qui c'est qui poinçonne les billets, des cacahouètes dans les oreilles et une scie à métaux entre les dents? Elle.

Elle ne dit jamais rien, mais elle est là. Elle ne me dit pas comment elle s'appelle, le générique ne dit pas où je peux trouver la clé pour m'en débarrasser ou pour la convaincre de me parler. Toutes les nuits elle est là. Parfois elle se contente de passer, au fond de la scène, comme si elle allait quelque part. Et tu vas où comme ça ma belle, dans les circonvolutions de mes névroses nocturnes? Tu cherches quoi, quel fil tirer pour dérouler la pelote de mes pensées? Est-ce que tu cherches par où tu vas instiller le poison de l'oubli, la noirceur de la maladie, le crabe qui va ronger ma comprenette et me faire oublier qui je suis alors que je ne suis même pas à la moitié du chemin qui doit me conduire à moi-même?

Pourquoi cette sensation, mademoiselle, que tu ne peux absolument pas me vouloir du bien, que tu es forcément là pour me nuire? Alors qu'en fait, ce que tu cherches, c'est peut-être simplement la sortie...égarée là par hasard, tu t'es trompée de rêve, tu allais chez une autre, et tu as atterri chez moi. Pas de bol...c'est peut-être toi la plus désorientée des deux. Oui mais c'est ma vie nocturne que tu squattes ma jolie.

Arrête de chercher, pose-toi, il faut qu'on cause.

Au matin, parfois, un cheveu incongru, ni à moi, ni au chat, ni aux visiteurs de passage, posé sur l'oreiller, me nargue de toute sa kératine.



(Souvent je me demande ce que ça fait de vivre toute sa vie en prison. Pas juste derrière les barreaux d'une geôle occidentale, mais par exemple dans un corps de femme en Afghanistan ou manœuvre sur un chantier de Dubaï, ou ouvrière dans une usine géante en Chine. D'avoir ces destins inébranlables, zéro espoir, ceux dont on sait qu'il ne changeront jamais. Savoir qu'on est toute sa vie prisonnière d'une maison, d'un mari crado, d'enfants non-voulus, d'une belle-mère salope, d'un contremaître tyrannique. Et vivre quand même. Choisir de ne pas mourir. Comment mesurer ça à l'aune de nos petites tristesses, chagrins d'amour, maux de dents, peines de boulot, problèmes de fric d'Occidentaux gâtés? On se dit qu'on ne le supporterait pas une journée, pas une heure.
Alors qu'en fait, si, probablement. La seule chose que l'on ne peut vraiment pas supporter, c'est d'y penser trop longtemps finalement.)