mardi 9 mai 2017

Cher abstentionniste du dimanche,

J’imagine que depuis le huit mai au soir tu te sens légitimé dans ta position de ni-ni, ni le Pen ni Macron, ni la peste ni le choléra, etc. Évidemment, clames-tu, tu n’as jamais voulu que le Pen soit élue, et tu es sûrement très soulagé-e qu’on ait échappé à cinq ans de haine sans que tu aies eu besoin de te «salir les mains» ou de voter «contre tes principes».

Tu as eu bien raison: en effet, on n’a pas eu besoin de toi finalement, on s’est débrouillés tout seuls, t’as vu. On l’a renvoyée dans ses buts la menace brune, et tu ne vas pas être obligé-e de t’acheter des bouchons d’oreille pour ne pas entendre les cris de désespoirs de ceux qui auraient été les victimes légales de la violence d’État. Tu vas pouvoir dormir tranquille, la conscience en paix.

Laisse-moi juste te dire un dernier mot, toi qui ne t’es pas laissé convaincre par ce grand cri de frayeur de ceux qui t’ont supplié d’aller voter dimanche: tu dégages une sale odeur, quand même.

J’ai constaté que ce qui fonctionnait le mieux pour faire bien comprendre la politique aux gens c’était les images familières, tirées de la vie quotidienne alors en voilà une qui va peut-être te faire comprendre pourquoi j’ai le nez qui frémit quand je pense à toi:

Imagine une colocation avec plein de gens sympas. C’est chouette, on est nombreux, de toutes les couleurs et de toutes les origines, c’est normal tu es quelqu’un d’ouvert, pour toi c’est la valeur humaine qui est importante, pas le faciès, tu es quelqu’un de bien. Eh bien ces élections, c’est comme si dans ta chouette colocation d’un seul coup les chiottes s’étaient bouchées. Tu y vas pour ton besoin naturel, et là, horreur: ça déborde de merde.

Tout le monde se réunit, assemblée générale de coloc, personne ne veut y aller. Et surtout pas toi. Mettre les mains dans la merde, et puis quoi encore? De toute façon, tu as fait caca ce matin, tu peux tenir vachement longtemps.

Eh bien dimanche, comme dans ta coloc, il y a ceux qui se sont retroussé les manches, qui ont pris une grande inspiration et sont allés déboucher les chiottes en mettant les bras dedans jusqu’au coude, et ceux qui ont attendu que quelqu’un fasse le boulot à leur place.
Pour pouvoir de nouveau aller poser leur pêche dès le lendemain, le cœur content et l’intestin léger, et surtout, surtout, les mains propres.

Il y a toujours dans tous les groupes humains ceux qui décident de faire pour l’intérêt général des trucs pas toujours agréables, et ceux qui se laissent porter en espérant qu’on règlera les problèmes à leur place. On ne t’a pas demandé si tu aimais l’un ou l’autre des candidats, ce n’était pas une émission de télé-réalité, ces élections. On t’a demandé à qui on allait donner les clés de la maison. Et le choix n’était pas entre la peste et le choléra, il était entre la peste et un candidat que tu n’appréciais pas (spoiler: moi non plus). On ne t’a pas demandé d’élire le gendre idéal, mais de valider le processus démocratique qui consiste à voter pour un des deux candidats qui parviennent au deuxième tour, et d’accepter le résultat du vote même s’il ne te convient pas. Petit rappel: tu te souviens du candidat Trump qui claironnait qu’il n’accepterait les résultats des élections que s’il les remportait?

Eh bien en décrétant que tu te retirais du jeu démocratique parce que tu n’aimais pas la tronche des candidats, en décidant de ne pas voter pour Macron parce que ce n’est pas le candidat que tu voulais voir gagner à la base, tu n’as pas fait mieux.

Alors on va vite passer à autre chose, maintenant que l’échéance est passée, on va oublier cette histoire d’abstention et même oublier qui dans notre entourage, au bureau, à la chorale, à l’école, dans la famille, avait clamé qu’il n’irait pas se salir les mains dans un bureau de vote. Mais à ta place j’aurais quand même la main lourde sur le déo, ces prochains temps. Il y a des odeurs persistantes.



dimanche 22 janvier 2017

Et surtout la santé

Désolée pour cette interruption de l'image et du son, mais je crois que le 7 novembre 2016 au soir, date de mon denier post ici, je me suis endormie très fort et je viens juste de me réveiller.

Dans mon rêve Trump était élu président de l'univers des États-Unis, Fillon (le gars qui a voté contre la dépénalisation de l'homosexualité en 1982) devenait le poulain de la droite et c'était tout à fait acceptable, personne ne m'offrait de chocolat à noël et je prenais quand même deux kilos en une semaine, mon compte en banque devenait tellement rouge que mon banquier se demandait si j'avais pris ma carte au PC, personne ne venait en aide aux Syriens bombardés à Alep, il faisait hyper froid et les clodos crevaient dans la rue, un uber refusait de me prendre parce que je lui demandais d'attendre trois minutes que ma fille arrive dans la nuit et le froid ("j'ai pas que ça à faire"), la dame à côté de moi au concert de Cosette ronflait comme un sonneur en plein Te Deum en dégageant des odeurs suspectes  et je devais corriger des Harlequin jusque tard dans la nuit pour joindre les deux bouts (mais assise).


Heureusement je viens de me réveiller...






lundi 7 novembre 2016

On serre les fesses



Mais on rit quand même (tout est bon à prendre)

(Ma théorie du complot à moi: Trump est le bras armé de tous les peuples premiers exterminés par les "Américains." Ah bah oui, il doit bien rigoler, Sitting Bull, de voir où ça les a conduits, les colons, de jouer les migrants dézingueurs au nom de la liberté. Trump, le bouton rouge d'autodestruction de l'Amérique. Même pas besoin d'appuyer, il va le faire tout seul).

En vous remerciant.


mercredi 14 septembre 2016

Terminus?

Cet été je me suis rendu ridicule et en Vendée, les deux simultanément, en partant acheter le pain et en coinçant ma jupe dans les rayons du vélo. Résultat, je me suis retrouvée avec deux possibilités aussi aguichantes l'une que l'autre: ôter ma jupe et tenter de l'arracher aux rayons du vélo, accroupie en string au beau milieu d'une résidence pavillonnaire, ou retourner à la maison à tout petits pas, attachée à mon vélo par le bas du jupon, en maintenant une allure naturelle et stoïque.

J'ai opté pour la deuxième solution (le naturel et le stoïcisme en moins), dans les deux cas de toute façon ma dignité était foutue. Déjà que c'est pas une denrée pléthorique. Mais finalement on vit très bien sans.

Je viens de lire dans El Pais qu'un machiniste avait arrêté son train qui faisait chaipluoù-Madrid dans une petite gare en chemin, parce que c'était l'heure d'arrêter de bosser et qu'il n'avait pas l'intention de faire des heures sups. Les passagers sont restés coincés deux heures dans le train aux portes verrouillées. Au début on leur a dit problème technique gnagnagna, et puis la guardia civil a fini par arriver et on les a mis dans des cars pour qu'ils terminent leur voyage, avec des heures et des heures de retard évidemment.

Alors c'est cocasse pour tout le monde cette histoire (sauf pour les passagers, ok), de penser que le gars il a fini, hop il saute de son train et il rentre chez lui. Sauf qu'on peut facilement imaginer qu'il y a dû y avoir un sacré ras-le-bol pour en arriver là, que son vase devait être foutrement plein avant que cette goutte ne tombe dedans. D'un autre côté, si tout le monde faisait comme lui, yaurait le plein emploi, parce que qui ne connaît pas des gens qui bossent environ deux, trois, ou mille fois plus que ce qu'implique leur contrat de travail? Amis burnoutés, bonjour!

(Il faudra essuyer un peu les plâtres évidemment. Que quelques femmes se sacrifient et acceptent de voir partir la sage-femme au milieu de leur accouchement (désolée, il est dix-huit heures!). Que quelques malades acceptent de mourir sur la table d'opération. Que quelques macchabées ne soient pas enterrés, ou brûlés à moitié. Qu'on se serve tout seuls au troquet après une certaine heure--s'il reste des trucs à boire, vu que les camionneurs pourront abandonner leur chargement après huit heures de route. J'aime bien l'idée, ça remettrait un peu de rythme, on s'endort un peu vous ne trouvez pas?) (Je réalise que c'est l'exact opposé de ce que permet la nouvelle loi travail. Je jure monsieur le juge que c'est une coïncidence).

Le machiniste j'espère qu'il est quelque part au bord de l'eau, une bière et une canne à pêche à la main, avec un bon pote et des sandwichs au chorizo, et qu'il profite tranquilou. Et que le facteur ne viendra pas lui filer le recommandé qui le vire, parce que lui aussi, il aura fini sa journée.








mercredi 8 juin 2016

L'homme arc-en-ciel


Hervé mettait des couleurs dans la vie du quartier et dans les chouettes dessins qu’il réalisait pour tout un tas de médias. Bonbon quinqua acidulé, il était souvent planté sur le pas de sa porte le cigare au bec, toujours partant pour offrir un sourire et tailler une bavette, sa chérie à ses côté et ses gamins jamais bien loin.

C’est aussi là qu’il est mort, et il laisse un sacré putain de trou dans la butte.

Les plus gentils partent en premier, c'est parce que c’est avec eux que Dieu a envie de passer le plus de temps?

En fait non. Juste la vie est une crevarde qui frappe au hasard et en en ce moment, elle a une sacrée dent contre les crayons.

©Baudry

dimanche 8 mai 2016

Allons zenfants

Aujourd'hui Macron est allé à Rouen faire l'article, c'est-à-dire parler de Jeanne d'Arc et dire à quel point elle avait "fendu le système" et "su rassembler le pays",  concluant même que "les Français ont besoin de Jeanne d'Arc car elle nous dit que le destin n'est pas écrit."


Résumons: Jeanne d'Arc c'est quand même une gonzesse définie par l'état de son hymen (la pucelle avant tout), qui prétendait entendre des voix, qui était persuadée que Dieu lui donnait des ordres quasi en direct : ("Gentil dauphin, je te dis de la part de Messire Dieu que tu es vrai héritier du trône de France"), et qui s'était permis de faire ce qu'aucun mâle dominant n'avait réussi à faire en cent ans de guerre, aka bouter les Anglais avec un coup de pied au cul pour leur donner de l'élan.

Donc, une fille qui au Moyen-Âge faisait TOUT ce que les filles ne doivent surtout pas faire (l'ouvrir et humilier des mecs). (Je dis au Moyen-Âge mais changez quelques lettres et ça marche assez bien pour à peu près toutes les époques et tous les continents). Et alors tout ce courage et ce mérite, ça lui a valu une médaille, un beau château, des terres et un mari qui ne la violerait pas trop souvent, forcément?

Ben non, ça ça aurait été si le destin n'avait pas été écrit. Mais le sien, à Jeanne, à partir du moment où elle a quitté le cul de ses moutons, il était clair comme du sperme de baleine: elle était cuite la môme et elle ne s'en sortirait pas aussi facilement.

Bon ceci dit tout cela n'est pas très grave, si ça prouve uniquement que Macron est une brêle en histoire médiévale, après tout on peut pas être bon en tout.

Mais quelle idée quand même de choper Jeanne justement, pour donner une image de personnalité qui fend le système (c'est marrant comme expression. À la fois on a l'impression de voir un bûcheron avec sa hache, et puis d'un autre côté, la fente de Jeanne, quand même, c'est limite irrespectueux. Je m'égare). À croire qu'il n'existait personne de plus récent, de plus rassembleur, de plus réaliste surtout....Eh, Manu, de Gaulle tu connais pas? Jaurès ça te dit rien? Une femme absolument? Lucie Aubrac alors?

Non, c'est Jeanne qu'il te faut. Comme le FN, quoi. C'est dit. Eh bien outre que c'est de la récup douteuse (attention, le recyclage à mauvais escient ça pue) ben moi je trouve ça affolant, d'ériger un personnage médiéval religieux symbole de la xénophobie de clocher comme unificateur des français.

Et ça n'a rien à voir (?) mais à Stalingrad, sous le métro aérien où se réfugiaient les réfugiés, il y a désormais des grilles qui empêchent absolument tout accès. Le terrain de basket et le trottoir sont devenus de vrais no-go zones où personne, et surtout pas des étrangers qui fuient la guerre après avoir tout perdu et tout subi, ne peut aller planter temporairement son désespoir. La mairie de Paris et le gouvernement n'ont pas besoin d'une nouvelle Jeanne pour bouter les Syriens hors de notre vue, la police aux uniformes bleu marine l'ont avantageusement remplacée.



dimanche 3 avril 2016

Blues

Après la jupe trop courte ou trop longue, voici un nouveau moyen de reprocher leur apparence aux collégiennes: la couleur des cheveux.

Tina, élève de 3e d’un collège du Var, a été exclue de son établissement parce qu’elle avait teint ses cheveux en bleu. Elle n’a eu le droit de retourner en classe... qu’avec une perruque.

«Si nous acceptions une telle originalité, nous ouvririons la porte à un effet boule de neige que nous ne pourrions plus maîtriser» a justifié la proviseure. Et comment la blâmer? Imaginez le cataclysme, si tous les collégiens décidaient de se teindre les cheveux en bleu (ou en rose)! Les conséquences seraient catastrophiques: ils auraient tous... euh, eh bien, les cheveux bleus ou roses (ce qui ne serait plus du tout original, pour le coup.)

Pour cette cheffe d’établissement, arborer à 15 ans une tignasse d’une couleur improbable est donc une bien plus grande originalité que d’obliger une adolescente non alopécique à se coller des cheveux qui ne lui appartiennent pas par-dessus les siens pour avoir le droit d’étudier.

On cherche le rapport. Tout comme dans le cas de cette proviseure–adjointe d’un collège du 18e arrondissement qui estime, elle aussi, que les cheveux teints (en vert) «ce n’est pas une tenue pour travailler», on doit donc en conclure que la couleur de la chevelure a une incidence directe sur les facultés cognitives. Ça doit être écrit en tout petit sur les boîtes de teinture: «Effets secondaires: troubles des apprentissages, originalité, effet boule de neige, risque de ratage du brevet des collège.»

Ou alors, on peut déduire qu’encore une fois, on refuse à une femme le droit de décider à quoi doit ressembler son corps sous prétexte de ne pas perturber les convenances et l’ordre social. Qu’il convient de cacher l’expression de la liberté féminine qui n’a pas à se manifester hors des sentiers battus. Ce message sexiste vous est gracieusement délivré par les représentants de l’éducation nationale.

L’incident rappelle le film Diabolo Menthe, de Diane Kurys, où une collégienne est débarbouillée de force par sa professeure parce qu’elle a osé porter du rouge à lèvres. La scène se déroule en 1963. Un demi-siècle plus tard, quelle réponse apporter au même genre de censure?


Yaurait bien ça, par exemple....